« Je dors foot et je me lève foot »

Christophe Delley (55 ans) a succédé, lors de l’assemblée des délégués du 23 août, à Benoit Spicher à la tête de l’Association Fribourgeoise de Football. FootFribourg a rencontré le nouveau président dans les locaux de l’AFF à Fribourg pour faire un tour d’horizon des différents dossiers du Lacois.

Vous voilà à la tête de l’Association fribourgeoise de football depuis peu. Comment se sont passés vos premiers jours dans le costume du président?

Dans l’ensemble très bien, puisque le passage de témoin entre Benoit Spicher, mon prédécesseur et moi-même s’est fait en douceur. On avait déjà passablement discuté au sein du comité et je connaissais les dossiers puisque cela fait onze ans que je suis au comité. Il n’y avait donc pas de surprises. Les championnats ont bien débuté et on va maintenant continuer à travailler sur les dossiers en cours.

Pour mieux connaître le nouveau président, parlez-nous de votre parcours personnel, professionnel et dans le foot.

Au niveau privé je suis marié et papa de deux enfants de 19 et 25 ans. Je travaille à l’Université de Fribourg depuis plus de 20 ans, étant rattaché à la faculté de droit. Le football est inné à la famille: je l’ai pratiqué depuis tout petit à Courtepin jusqu’en Inter C (maintenant la Youth League) avant d’aller au FC Central jusqu’en Inter A. Je suis ensuite revenu à Courtepin pour évoluer quelques saisons en deuxième ligue. J’ai commencé ensuite à entraîner les juniors, puis de fil en aiguille j’ai passé quelques diplômes avant de prendre des fonctions dans le comité pour finir comme président des juniors. Benoit m’avait alors contacté et proposé de prendre sa place au sein de l’Association fribourgeoise de football puisqu’il était candidat à la présidence. C’est comme ça que je suis entré à l’AFF.

Et après 11 ans passés au comité, vous voilà président. Comment devient-on le nouvel homme fort du foot fribourgeois?

Tout d’abord je tiens à dire que des discussions ont eu lieu au sein du comité où d’autres personnes avaient également une grande expérience au sein de l’AFF et auraient pu prétendre au poste. Mais les regards se sont très vite tournés vers moi et j’ai senti que j’avais le soutien du comité central, ce qui était primordial pour moi. Il y a bien évidemment eu une réflexion personnelle et familiale, mais tout s’est coordonné pour que je sois candidat. Pour le comité et Benoit en particulier c’était un souhait d’avoir une continuité. De même quand il a annoncé aux clubs qu’il n’allait pas se présenter pour un nouveau mandat, on a senti que ces derniers aussi souhaitaient une continuité. C’est pour toutes ces raisons que je me suis porté candidat. Mais c’est aussi un défi après onze ans passés à la commission technique et des juniors où j’ai essayé de donner le maximum pour le bien des juniors filles et garçons.

Ce soutien des clubs, c’est donc un signe que l’AFF travaille bien?

Tout à fait! On l’a senti avant l’élection où il n’y a pas eu d’autre candidature proposée, mais aussi lors de l’assemblée puis lors de l’élection où il y a eu un soutien massif des clubs. Je reçois d’ailleurs encore de nombreuses cartes et messages de soutien. Je serai évidemment à mon tour en soutien de ces clubs en donnant le maximum avec mon comité central, puisqu’un président seul ne fait pas grand chose.

Quels sont les dossiers prioritaires de votre début de mandat?

Je l’ai annoncé lors de mon discours après l’élection, un des dossier principal est le foot féminin. On a vécu un Euro fantastique en battant le record d’affluence dans les stades mais aussi devant la télévision. On sent depuis quelques saisons, au sein de notre association mais également au niveau national, un attrait pour le foot féminin avec une belle augmentation du nombre de licenciées. Je pense qu’aujourd’hui est le bon moment pour mettre sur pied une commission pour le football féminin. C’est donc un de mes premier gros défi pour que cette commission puisse commencer à travailler dès la saison 2026/2027. Un autre objectif, toujours en lien avec les femmes, est d’augmenter la présence féminine au niveau du comité central de l’AFF, dans nos diverses commissions mais également à l’intérieur des clubs. Je souhaite donner une impulsion supplémentaire pour qu’un maximum de femmes soient présentes.

Un autre grand défi est de continuer la formation des entraîneurs et des arbitres. Cette année nous avons plus d’inscrits que de départs. J’espère que c’est un signe positif! Et enfin il y a un domaine que l’on ne doit pas négliger, c’est le fair-play sur et autour des terrains. Nous avons eu quelques cas la saison passée, dont un cas grave qui a nécessité de lourdes sanctions et c’est un domaine sur lequel nous devons continuer à travailler en sensibilisant un maximum et en étant intransigeants: des sanctions doivent tomber si des joueurs, joueuses ou des personnes au bord des terrains ont des comportements intolérables.

La saison passée l’AFF a d’ailleurs mis sur pied une semaine contre le racisme, qui s’est avérée très positive. Est-ce que la prévention comme telle, couplée à des sanctions suffit?

Les sanctions ne suffisent pas, c’est un des moyens que nous avons à notre disposition. Pour moi la sensibilisation est très importante. Il faut informer que de tels comportements n’ont pas leur place au bord des terrains. Ce qui est important est la formation des entraîneurs et des arbitres qui ont un rôle à jouer. S’il y a une montée de tension sur le terrain et que l’arbitre a des outils à sa disposition, un retour au calme est possible. En ce qui concerne les entraîneurs, ils sont également importants et on doit pouvoir leur amener de la formation et des outils pour passer les messages. Mais on en appelle également aux responsables des clubs qui doivent pouvoir intervenir auprès des personnes qui ne se comportent pas de la bonne manière au bord du terrain.

On va donc continuer à mener ce thème et à réfléchir avec les clubs. Nous discutons également avec la police qui a des personnes formées pour apporter un soutien lors de gros évènements par exemple. Nous allons continuer à discuter et à trouver des solutions à apporter aux clubs. Et suite à la campagne de sensibilisation contre le racisme de la saison passée, une autre action de ce type sera menée certainement ce printemps. Il faut continuer d’en parler, ne pas mettre ce qui a été fait dans un tiroir. Si tout le monde en entend parler régulièrement, cela peut pousser à faire réfléchir.

L’arbitre est souvent, et de plus en plus au centre de débats animés. Comment donner envie à un arbitre de continuer à se déplacer le week-end pour siffler des matchs s’il se fait insulter durant 90 minutes?

La formation des arbitres est très importante, comme je l’ai déjà dit. En ayant des outils appropriés, il est plus facile de faire abstraction ou alors de réagir correctement à des situations potentiellement désagréables. Cela n’est pas propre au football et nous sommes en train de mettre sur pied, avec l’Association Fribourgeoise des Sports, deux soirées d’information en novembre où tous les représentants de clubs seront invités afin de réfléchir ensemble sur la façon de gérer ces phénomènes-là à l’intérieur des clubs. Les émotions existent dans tous les sports, mais elles peuvent être canalisées.

Pour en revenir au foot féminin: l’Euro a donné de grands espoirs et tout le monde parlait de capitaliser là-dessus afin de développer le foot féminin. Quelques semaines après la fin du tournoi, ne pensez-vous pas que l’engouement soit déjà retombé et qu’on n’ait pas forcément su saisir ce qu’il y avait à saisir?

Après chaque grand tournoi, que ce soit chez les hommes ou les femmes, le soufflé retombe juste après. C’est tout à fait normal. Mais il y a passablement d’actions qui ont été mises en place, que ce soit par l’AFF ou au niveau national, afin de relancer la machine. Nous avons, avec l’ASF, fixé à 2027 pour proposer des actions aux clubs. Un nouveau site web va bientôt arriver notamment pour continuer à faire vivre cet Euro. Nous aurons bientôt un tournoi réservé aux plus de 28 ans, qui est idéal pour les femmes qui se sont éloignées du foot et qui souhaiteraient y revenir. Toutes ces actions, et d’autres, sont déjà en cours.

Ce qui est très positif est que nous sentons un changement au niveau des mentalités. L’Euro a donné une impulsion supplémentaire, une prise de conscience à l’intérieur des clubs. De plus en plus de filles viennent frapper aux portes et les clubs sont plus enclins à discuter entre eux pour trouver les places nécessaires, par exemple. A nous maintenant de faire vivre ces actions pour donner envie aux filles de venir dans le foot, que ce soit en tant que joueuse ou dans les comités des clubs!

Il y a quelques mois votre prédécesseur nous disait que le foot fribourgeois se porte très bien. Est-ce aussi votre avis?

Ah oui! On a une augmentation du nombre de licencié.e.s, en tout cas jusqu’à vingt ans. On a un supplément d’équipes, également dans le foot féminin. On sait que dans les clubs cette augmentation n’est pas toujours facile à absorber, avec parfois un manque d’infrastructures, de bénévoles ou d’entraîneurs. Mais c’est réjouissant que la base soit autant dynamique!

Pourtant il y a eu plusieurs retraits d’équipes en cours de championnat la saison passée, et déjà trois (FC La Combert II et FC Central Ia en 4e ligue et US Rue en 5e ligue) cette année, alors que le championnat n’avait pas encore commencé.

Oui on le sait que dans ces catégories-là (4e-5e ligue), c’est plus compliqué. On ne fait plus une équipe à 18 ou 19, comme par le passé. Aujourd’hui il faut au minimum 25 joueurs pour être tranquilles pour la saison. Est-ce que ces clubs-là étaient limites à ce niveau-là? Est-ce qu’ils n’ont pas trouvé les quelques joueurs supplémentaires qui leur aurait permis d’être sereins durant toute la saison? Je n’ai pas encore eu de discussions avec les présidents de ces clubs, mais on peut imaginer que ça vient de là. C’est évidemment toujours très embêtant d’avoir des retraits d’équipes, encore plus avant de commencer la saison puisque le relégué est déjà connu. Malheureusement on doit faire avec car on n’a pas de solutions à ce niveau-là. On a juste à espérer que les clubs qui ont retiré leurs équipes travaillent afin de reconstruire quelque chose et redonner une dynamique au club.

Est-ce que le canton de Fribourg, qui est un canton qui adore son foot des talus, pourrait un jour se mobiliser pour un club fort qui militerait en Challenge League?

Oui je pense que notre canton peut se mobiliser autour d’un club. Fribourg a un fort esprit de clocher où chacun veut défendre le club de son village, mais c’est très positif car ça fait vivre notre Association! Maintenant on sait que pour aller vers le haut niveau, il faut rassembler des forces. Un seul club dans un village, sans apport d’un mécène, ne peut pas arriver au niveau de la Challenge League. A travers notre centre de formation, nous essayons depuis quelques années de rassembler ces forces. Un pôle de formation a été mis en place avec nos M18 et nous rencontrons une à deux fois par tour les dirigeants des clubs de 1e ligue et 2e ligue inter pour donner une chance à ces jeunes qui n’auraient pas eu leur place à YB ou ailleurs, de pouvoir jouer à un bon niveau. Il faut que ces jeunes aient un chemin avec des clubs fribourgeois pour atteindre le haut niveau. Mais en tout cas les discussions sont en route et si nous arrivons à continuer dans ce sens-là, j’espère que nous pourrons fédérer autour d’un club, qui est actuellement le FC Bulle.

Et il ne faut pas oublier le foot féminin! Je défends les équipes féminines car je pense qu’il y a du potentiel dans notre canton. Un palier a été passé par les meilleures équipes, et sauf erreur sept filles fribourgeoises ont été retenues à YB, ce qui veut dire que le travail est bon.

On le voit, vous travaillez sur de nombreux dossiers mais vous êtes également présent au bord des terrains. Quelle est la journée type du président de l’AFF?

C’est important de rappeler que j’ai une vie professionnelle à côté de cette fonction. Mais en tant que président de l’AFF, on se lève « foot » et on dort « foot ». On a toujours le foot dans un coin de la tête. Mes journées sont très longues car après mon travail à l’université j’enchaîne souvent avec une à deux séances de travail pour l’AFF et ensuite j’essaie d’aller voir des matchs en soirée. J’arrive généralement à aller voir trois à quatre matchs par semaine, mais je sais que la plupart de mes soirées seront prises par cette fonction. J’essaie également d’honorer un maximum de sollicitations et d’invitations, que je partage avec mes collègues du comité central. C’est beaucoup de travail, mais c’est fait avec passion et plaisir! Si ce n’était pas le cas je n’aurais pas accepté ce poste.

Votre mandat est de trois ans. Si on se projette en 2028, qu’est-ce qui aura changé dans le paysage du foot fribourgeois et qu’est-ce que vous aurez souhaité conserver comme tel?

Je souhaite garder cette continuité dont nous avons parlé en début d’entretien, le fait également d’être proche des clubs. J’ai besoin, comme c’était le cas pour Benoit, de sentir l’odeur du gazon. Je ne peux pas être constamment dans le bureau et gérer tout ce qu’il y a à gérer à distance. J’ai besoin du contact avec les gens, de sentir le foot. J’espère que ma santé continuera à me permettre de me rendre sur les terrains du canton. Et ce que je souhaiterais changer d’ici trois ans est ce que j’avais déjà annoncé: de créer cette commission « foot féminin » et d’amener un maximum de femmes également au sein de l’Association et dans les clubs. Et avec notre chef technique qui est hyper-actif dans la formation, j’aimerais continuer à donner un maximum de possibilités à nos entraîneurs, nos fonctionnaires de pouvoir se former.

Dernière question: que peut-on vous souhaiter pour ce mandat?

De continuer à avoir la santé pour mener à bien tous ces dossiers et que notre Association continue de grandir. Que les petits et grands, filles et garçons, jeunes et moins jeunes trouvent leur place au sein de l’AFF.

Interview & Photo: Séb Mory

Rédacteur & photographe: Séb Mory

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